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Article Dans Une Revue Revue d'Economie du Développement Année : 2009

Introduction

Résumé

Ce numéro spécial a pour origine première une sélection de communications présentées lors du colloque " Capital humain et développement ", organisé en février 2008 au CERDI dans le cadre du Groupement De Recherches CNRS (GDR) 2989 " Economie du développement et de la transition ". Il est composé de six articles consacrés à des questions importantes concernant certaines relations complexes entre santé et développement. Importantes, les questions auxquelles ce numéro apporte une contribution le sont, d'une part sur le plan de la recherche académique, où elles font l'objet de débats et où les connaissances sont insuffisantes, et d'autre part pour les choix et les modalités de mise en oeuvre des politiques publiques qui sont au coeur de la problématique des Objectifs du Millénaire du Développement. Patrick Guillaumont, Catherine Korachais et Julie Subervie analysent comment l'instabilité macroéconomique affecte l'évolution de la mortalité infantojuvénile. Utilisant des données en panel pour un large échantillon de pays, ils considèrent tout d'abord les effets de l'instabilité du revenu, puis ceux des sources primaires d'instabilité, celle des prix agricoles mondiaux, des exportations de biens et services, et de la production agricole. Ils montrent que ces instabilités macroéconomiques sont susceptibles d'affecter la survie infanto-juvénile au delà de ce qui résulte de leur impact sur la croissance du revenu par tête. En effet, elles exercent une influence non réversible sur la mortalité, en raison de l'asymétrie de réaction de la santé des enfants aux chocs positifs et négatifs auxquels sont exposés les pays. De plus, ces instabilités sont susceptibles d'entraîner une plus forte inégalité des revenus, ce qui réduit le taux de survie moyen des enfants. Jean-Claude Berthélemy et Juliette Seban s'interrogent sur la mesure dans laquelle les dépenses de santé peuvent avoir une influence sur le degré de concentration de l'accès aux services de santé, donc sur l'équité dans l'accès aux soins, pour ce qui concerne la santé maternelle et infantile. Leurs résultats, issus de différentes méthodes économétriques, ne leur permettent pas de conclure clairement. Les auteurs montrent par ailleurs que des dépenses publiques de santé plus importantes profitent un peu plus aux pauvres qu'aux riches ; cependant, leur progression se traduit tout au plus par une amélioration marginale de l'équité dans l'accès aux services de santé. La lutte contre l'épidémie de VIH/SIDA et contre le paludisme est une préoccupation majeure des gouvernements des pays en développement et de leurs partenaires extérieurs. C'est à cette problématique que sont consacrés les quatre articles suivants. Chrystelle Tsafack Temah analyse, à partir de données en panel, le rôle des déterminants épidémiologiques, socio-économiques et socioculturels dans le développement de l'épidémie de VIH/SIDA en Afrique subsaharienne. Elle montre que ce sont les variables épidémiologiques et socioculturelles qui ont l'impact le plus important, et que, dans le domaine socio-économique, les facteurs les plus déterminants sont les inégalités de revenus et les inégalités de genre. L'article de Mead Over, qui lui fait suite, examine la réponse des États- Unis au développement de l'épidémie de VIH/SIDA en analysant le " Plan d'urgence du Président pour l'aide dans la lutte contre le VIH/SIDA " (PEPFAR). Il montre que ce plan a obtenu des succès manifestes dans plusieurs domaines, mais que ces succès contiennent les germes de crises futures en ayant involontairement créé un nouveau " droit " mondial au traitement, et dont le coût dépassera les capacités de financement des États-Unis. Si rien n'est fait, il en résultera une diminution des dépenses consacrées aux activités de prévention, dont l'importance est déjà sous-estimée, relativement au traitement, que ce soit dans le PEPFAR ou dans la plupart des autres programmes de lutte contre le VIH. L'auteur propose un ensemble de mesures visant notamment à recentrer le PEPFAR sur la prévention et à créer des synergies entre celle-ci et le traitement. Les deux articles suivants portent sur les effets du paludisme. Martine Audibert, Jean-François Brun, Jacky Mathonnat et Marie-Claire Henry analysent économétriquement les effets du paludisme sur la production d'un échantillon de producteurs ivoiriens de café et de cacao. La littérature fournit des résultats très contrastés en ce qui concerne l'impact du paludisme sur la production agricole. Comme certains travaux, les résultats des auteurs ne mettent pas en évidence d'effets significatifs du paludisme sur les productions considérées. Les auteurs avancent différentes explications. L'une est notamment que la morbidité palustre des adultes serait, dans leur zone d'étude, relativement peu invalidante. À cela s'ajoute le fait que le café et le cacao sont des types de culture qui requièrent moins que d'autres un recours intensif au facteur travail, comme le coton par exemple, pour lequel des effets négatifs ont été trouvés. L'article de Josselin Thuilliez est consacré à une question particulièrement peu étudiée, l'impact du paludisme sur les taux de redoublement et d'achèvement dans l'éducation primaire. Ses résultats, issus d'une analyse transversale, et robustes lorsqu'ils sont confrontés à différents tests, suggèrent que l'intensité du paludisme favorise le redoublement et pénalise les taux d'achèvement, s'avérant ainsi une barrière à l'accumulation du capital humain. Cette étude souligne par ailleurs l'existence de relations ambiguës entre les mesures de performances scolaires et les indicateurs de ressources investies dans l'éducation primaire. Plusieurs implications communes se dégagent de ces articles. Nous en citerons brièvement quelques-unes. En matière de recherche tout d'abord : (i) la confirmation, si besoin était, de la complexité des relations entre santé et développement, et l'extrême difficulté qu'il y a à vouloir en tirer des conclusions " simples " et généralisables ; (ii) la grande attention qui doit être portée au choix des méthodes et à ce que mesurent véritablement certaines variables ; (iii) les nombreuses zones d'ombre qui subsistent et, le besoin d'analyses complémentaires aux niveaux, dans la plupart des cas, macro et micro-économiques. Concernant la définition et la mise en oeuvre des politiques de santé, ensuite : (i) elles ne peuvent faire abstraction des contraintes qui résultent de l'instabilité de leur environnement macroéconomique avec, ajoutons, en miroir, l'évolution de l'espace budgétaire propre à chaque pays ; (ii) chercher à desserrer la contrainte en ressources financières - augmenter les dépenses - non seulement ne suffit pas, mais n'a véritablement de sens que si les efforts en la matière sont couplés à une amélioration de leur efficience au regard des objectifs poursuivis ; (iii) la nécessité de poursuivre vigoureusement les réorientations amorcées pour dépasser la dichotomie entre programmes verticaux de lutte contre des maladies spécifiques et renforcement des systèmes de santé ; (iv) et, dernier point de cette énumération très sélective qui ne rend pas justice à la richesse des papiers, la confirmation de la nécessité de mettre en oeuvre des politiques synergiques dans le domaine de l'amélioration de la santé, de l'éducation et de la nutrition, dont l'importance a été clairement soulignée par la littérature.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-00395322 , version 1 (15-06-2009)

Identifiants

  • HAL Id : hal-00395322 , version 1

Citer

Martine Audibert, Jacky Mathonnat, Jean-Claude Berthélemy. Introduction. Revue d'Economie du Développement, 2009, 23 (1-2, "Santé et développement"), pp.5-7. ⟨hal-00395322⟩
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