Ingénierie par et pour les jeux sérieux - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Accéder directement au contenu
Ouvrages Année : 2015

Ingénierie par et pour les jeux sérieux

Agnès Front
Camille Salinesi

Résumé

Jeux sérieux, opportunisme ou oxymore ? L'idée fondamentale des jeux sérieux est d'appliquer les principes des jeux (vidéo, mais pas forcément) dans d’autres domaines que le divertissement. Un exemple éloquent est celui du jeu de puzzle fold.it proposé par le département de biochimie de l’Université de Washington. Grâce à ce jeu, les chercheurs du département mobilisent une force intellectuelle considérable sur des problèmes de pliage de protéines dont les structures sont encore inconnues, identifiant ainsi de nouvelles stratégies de pliage qui servent ensuite à concevoir des logiciels de prédiction de protéines plus efficaces. Un autre exemple est celui du système de recommandation du loueur de vidéo à la demande Netflix. Afin de surmonter les limites des algorithmes classiques de recommandations, la société a exploité les données collectées grâce à un jeu, inventant ainsi un nouveau mode de catégorisation des films qui est devenu une clé essentielle de son modèle économique. Ces deux exemples ont un point commun : une exploitation opportuniste des jeux qui, tout en conservant leur caractère ludique, arrivent à atteindre des buts que l’on peut qualifier de sérieux. Il n’y a donc pas nécessairement contradiction entre la dimension ludique que l’on est en droit d’attendre d’un jeu de ses finalités éventuellement sérieuses. Tout naturellement utilisés dans le monde de l’éducation afin de permettre aux élèves d'apprendre en s'amusant, les jeux sérieux trouvent un nombre sans cesse croissant d'applications : publicité, formation professionnelle, lobbying et activisme, préparation et entrainement militaire, compréhension des ressorts de la performance et des processus de l’entreprise, etc. Peut-être parce qu’ils ont su introduire une certaine forme de ludicité –pour ne pas dire de légèreté- dans des sujets difficiles, parfois même conflictuels, les jeux sérieux ont démontré leur intérêt dans une série de situations dans lesquels on ne les attendait pas. Inventer, créer, concevoir, développer de tels jeux sérieux n’est certainement pas simple. Ce numéro spécial présente 5 articles qui donnent un aperçu non exhaustif de travaux de recherche actuels qui soit utilisent les jeux sérieux dans le contexte de l’ingénierie de systèmes d’information, soit visent à développer des jeux sérieux intégrés aux systèmes d’information. Le premier article, présenté par Daniel Lang, Olfa Chourabi et Imed Boughzala nous plonge directement dans le monde des systèmes d’information. La question posée est celle de l’efficacité d’un jeu sérieux – ici INNOV8- dans l’enseignement des SI. L’article présente les résultats d’une expérimentation menée avec INNOV8 dans une école de commerce, dans lequel le jeu sérieux a été utilisé pour l’enseignement du management des processus métier. L’article montre un retour globalement positif, mais un apport limité pour les étudiants novices. Il faut cependant retenir que le jeu sérieux complète efficacement les exposés magistraux à caractère « théorique » en permettant aux apprenants d’être acteur dans leur apprentissage et ainsi de développer d’autres compétences par des mises en situation proches de leur future vie professionnelle. Le deuxième article aborde la spécificité des jeux sérieux du point de vue de leur conception. Analysant 10 travaux sur les procédés de conception de jeux sérieux, Damien Djaouti propose une généralisation sous la forme d’une méthode de conception de jeux sérieux, qualifiée de « générique » au sens où elle met en exergue les récurrences des méthodes étudiées. Dans la même lignée, Hassina El Kechai et Laëtitia Pierrot rendent compte dans leur article d’une expérience de création de jeux sérieux par une démarche de conception participative. L’article montre qu’en impliquant les utilisateurs finaux dans le travail de conception, la démarche participative a permis d’une part de mieux caractériser les situations pédagogiques traitées, d’autre part de préserver les besoins des utilisateurs finaux, alors que ceux-ci sont parfois sacrifiés au profit d’un réinvestissement technique. Le quatrième article de Philippe Lépinard, Claude Chary et Muriel Meyer est aussi un retour d’expérience, mais qui cette fois présente un cheminement inverse : il s’agit ici de construire un système totalement sérieux – un simulateur militaire destiné à la formation et à l’entrainement des combattants des bas échelons tactiques – en partant d’un jeu vidéo. L’article montre les défis techniques et conceptuels rencontrés par l’Armée de Terre pour rendre ce système apte à supporter les missions de formation qui lui sont attribuées. Enfin, Thomas Constant, Axel Buendia, Catherine Rolland et Stéphane Natkin s’intéressent aux mécanismes de prise de décision dans les jeux sérieux, et au rôle qu’y joue l’excès de confiance. L’excès de confiance est l’un des comportements les plus étudiés dans les travaux sur la prise de décision en situation d’incertitude. Reposant sur une analyse approfondie d’une littérature riche et diversifiée sur le sujet, cet article introduit quelques éléments pour une méthode de conception d’un jeu sérieux focalisé sur le comportement d’excès de confiance.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01464192 , version 1 (10-02-2017)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01464192 , version 1

Citer

Agnès Front, Camille Salinesi (Dir.). Ingénierie par et pour les jeux sérieux . 20 (1), 2015, Revue RSTI - Ingénierie de Systèmes d'Information. ⟨hal-01464192⟩
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