La noblesse dans la mort. Sociogenèse funéraire du groupe nobiliaire en Franconie (XIVe-XVIe s.) - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2001

La noblesse dans la mort. Sociogenèse funéraire du groupe nobiliaire en Franconie (XIVe-XVIe s.)

Résumé

Le caractère constitutif de la commémoration dans la genèse et la reproduction des groupements sociaux a été mis en valeur par les recherches des médiévistes allemands sur le phénomène de la "memoria" : la commémoration des membres morts est, avec le serment mutuel initial et le repas commun à période régulière, l'un des trois facteurs indispensables à l'existence d'un groupement social ; par conséquent, pas de groupement social sans commémoration. Or, dans la première moitié du XVe s., la Franconie est le théâtre d'un processus de « sociogenèse de la noblesse », c'est-à-dire de l'invention de « la noblesse » (der Adel) en tant que groupe social. Pour schématiser, on passe de « nobles », dont l'identité sociale découle de la naissance et de considérations fonctionnelles globales et générales à l'Occident, à une catégorie dotée d'un nom reconnu (« la noblesse »), de pratiques collectives spécifiques et de discours homogénéisants. La question qui se pose alors est : dans quelle mesure cette sociogenèse a-t-elle impliqué une modification des formes de commémoration, c'est-à-dire : la commémoration des morts a-t-elle servi – et si oui, comment ? – à la sociogenèse de la noblesse en Franconie à la fin du Moyen Âge ? L'examen des tombeaux aristocratiques conservés dans cette région jusqu'au XVIe s. révèle plusieurs phénomènes. D'une part, l'apparition de deux puis quatre écus armoriés au lieu d'un seul, qui manifeste l'intégration sociale du défunt dans un réseau matrimonial, puisqu'il s'agit des écus des aïeuls – ce qui correspond à l'adoption d'un décompte de la noblesse par quartiers, et non par degrés comme en France. Les rythmes différents d'évolution selon que l'on a affaire à une femme ou à un homme correspondent par ailleurs à des changements spécifiques que l'on peut observer au niveau de l'anthroponymie et de la sigillographie. Ces deux codes ainsi que la représentation funéraire signalent ainsi clairement la fonction d'articulation interne (« horizontale ») de l'aristocratie qui est dévolue aux femmes, les hommes ayant en charge la reproduction lignagère (« verticale »). En outre, l'examen de la statuaire sur les tombeaux, sur lesquels les hommes sont de plus en plus représentés en armure de tournoi, est tout à fait congruent avec le caractère central de la pratique du tournoi dans le processus sociogénétique : « la noblesse » se définit fondamentalement comme « tournoyeuse », moyennant quoi le noble n'est concevable que comme « tournoyeur ». L'homogénéisation formelle de la représentation (presque tous les défunts sont figurés de la même manière) vient souligner à son tour l'unité et l'homogénéité du groupe, dont la pétrification assure l'éternisation. La représentation funéraire, orientant la commémoration des défunts vers des instruments identitaires collectifs, en tant que membres de la noblesse, apparaît donc un facteur essentiel de la sociogenèse de la noblesse en Franconie à la fin du Moyen Âge.
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halshs-00290592 , version 1 (25-06-2008)

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  • HAL Id : halshs-00290592 , version 1

Citer

Joseph Morsel. La noblesse dans la mort. Sociogenèse funéraire du groupe nobiliaire en Franconie (XIVe-XVIe s.). La noblesse dans la mort. Sociogenèse funéraire du groupe nobiliaire en Franconie (XIVe-XVIe s.), 1998, Mont-Saint-Aignan (Rouen), France. pp.387-408. ⟨halshs-00290592⟩
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